Un jour, je suis au Balto rue du Commerce à Tours, et le barman me présente comme bassiste à un mec de 40 balais, qui s'appelle Alan Jack. À l'écoute de son nom, je suis censé connaître. Heu… Mais si, Alan Jack Civilisation ? Tu vois pas ? Bin, non !
Aparte
À l'époque à Tours, tout se passe dans le quartier du "Vieux-Tours" quasiment. Par conséquent, habitant tout près, y jouant régulièrement, ou y travaillant souvent dans les cafés ou les restos, je suis souvent aux premières loges pour entendre les ragots, et heureusement, aussi pour les bons coups. J'y fais aussi de mauvaises et de bonnes rencontres. Jacques en est une fameuse. Inoubliable !
Reprise
Ainsi, mû par une "insolente" jeunesse, et avec à l'esprit les dires à propos des vieux de la vieille scène tourangelle, je suis un peu méfiant. Va savoir… "Qui c'est ce mec-là ?" (P. Vassilu)
En fait, Jacques se présente très modestement, m'expliquant qu'il est de retour sur la ville, et cherche à former un orchestre pour l'accompagner. Il me paraît sincère, et son discours sur la musique est plein de conviction. Ça fait envie pour un jeune comme moi. Y a pas de frime ou de vision fantasmée. Ce gars-là me paraît habité par la musique, et m'impressionne. Nous nous séparons amicalement, et je lui promets d'en parler autour de moi.
Renseignements pris à toutes fins utiles, je me rends compte du phénomène, et de son parcours musical. Fichtre !
Jacques a partagé la scène de festivals avec Jimi Hendrix, Bill Haley, Spencer Davies Group,… Purée ! Et ça tombe sur nous.
Je dis nous, car avec mon ami Jose Larraceleta, nous sommes devenus inséparables depuis l'époque du Top Boogie. Nous n'arrêtons pas de former des groupes en commun, tout en jouant l'un et l'autre avec d'autres formations.
José étant plus doué, surtout pour les cheveux longs, il navigue entre le hard rock, le heavy, le jazz-rock… De mon côté, c'est plutôt banane et rockabilly.
En fait, on aime tellement ça la musique, qu'on peut s'adapter à différents styles sans aucu problème. Mais, notre dada en fait, c'est le blues. Muddy Waters, BB King, et surtout Johnny Winter. Nothin' but the blues !
Les autres aussi, on les aime… Mais eux d'abord !
Avec Jack, là on sait qu'on touche pour de vrai au mythe du cette musique qu'on aime tant. Blues, Rythm'n'blues, Soul)
Alan Jack, suite
De l'été 84 à l'hiver 1985, notre fidélité à Alan Jack est sans faille. C'est parti pour toutes une série de concert aux Colibri, à l'Amphi, dans des cafés et festivals des environs, etc.
C'est super ! Nous jouons beaucoup, mais Jacques a envie d'un autre son, d'une autre formation bien à lui. Nous essayons, mais voilà, ce n'est pas le bon moment. Pour des raisons personnelles qui resteront siennes, nous arrêtons, et une distance va s'installer. La vie continue…
Finalement, cette pause aura été nécessaire et bénéfique, car un an plus tard, Jacques concrétise son souhait en formant : "Alan Jack et les GB's avec Bruno Germain dit "Coq" à la guitare (son guitariste de l'époque), Stef Barral à la contrebasse, Yéyé à la batterie, et puis deux cerises du nord arrivent sur le gâteau : Piero et Moino, les soeurettes aux grands choeurs. Et ça donne : Alan Jack et les Nordetts". Un swing terrible !!! (voir la vidéo)
Suivra ensuite Alan Jack Post Civilisation.
Petit mot de la fin
Jacques m'a appris à faire de la musique autrement qu'avec mes doigts. Avec la tête, le coeur et la passion… Se fondre dans l'orchestration, être minimaliste, devenir une subtile présence. La bonne note au bon moment. Rien de plus. "La basse, c'est le poumon. La batterie, c'est le coeur."
Jack était un chef d'orchestre. À notre première rencontre lorsqu'il a prononcé ces mots "monter un orchestre", ça m'a paru bizarre d'entendre ce mot. Et puis, ça m'a rappelait cet autre Jack, des Blues Brothers.
Milles excuses encore pour cet méfiance que j'ai eu Jack, et milles mercis pour ce que tu m'as donné. Nos bons mots au coin du feu à Sepmes, charmant petit village qui abrite la menuiserie Dubois… Pour ces étés étoilés, vivant comme des hippies, dans ta ferme magique… Qu'on voulait partir sur une île, emmenant avec nous plein de femmes… Qu'on se nourrirait de fromage de lait de femme pour pas finir cannibales. Et pour les remercier, nous n'aurions qu'à leur faire l'amour… Tellement nous les aimons.
Un soir, tu as été très franc pour recadrer certains médisants :
"Yann, c'est peut-être pas le meilleur bassiste, mais c'est sa compagnie qui est indispensable". Merci.
M'étant fait chourer mon appareil photo un soir de concert, je n'ai plus fait de photo à cette époque. Dommage ! Seules quelques affiches ont suivi, et une K7 de répèt' pleine d'instants inédits, dont ces quatre morceaux.